30/03/2019

Une semaine de whisky (2) : Tam o'Shanter (réédition d'un billet du 13/7/2010)



Donc "Love", de l'imaginaire Brian Shitart, n'est qu'un repiquage, un détourage d'une gravure - célèbre pour le coup - de


John Faed (1820-1902) - Tam o' Shanter and the witches.


Et ce ballet de sorcière illustre la scène centrale de Tam o' Shanter (1791) du poète écossais Robert Burns, l'auteur d'un truc que vous avez tous sans exception chanté, Auld lang syne.

Tam o' Shanter est un poème de l'ivresse, de la dérive, du sexe et de la peur. Tam, au soir du marché de la ville d'Ayre, boit pas mal de bière nouvelle, sans compter que

Wi' usquabae, we'll face the devil!

Un bon coup de whisky, et nous bravons le Diable! (1)

jusqu'au moment où, hélas

Pleasures are like poppies spread,
You seize the flow'r, its bloom is shed

Les plaisirs, comme les coquelicots dans les prés,
Se fanent si vous les cueillez

et où il doit remonter sur Meg, sa bonne jument grise pour rentrer chez lui dans la nuit, sous l'orage et l'éclair. Après avoir passé le gué il aperçoit l'église d'Alloway remplie de lumière, s'approche et voit

Robert Burns - Tam O'Shanter and Souter Johnny
Illustrations de Thomas Landseer, gravures de George Wilmont Bonner

Warlocks and witches in a dance:
Nae cotillon, brent new frae France,
But hornpipes, jigs, strathspeys, and reels,
Put life and mettle in their heels.
 
Vous n'y comprenez goutte ? C'est que c'est un mélange d'anglais et de Scots (2). Vous avez une traduction anglaise ici. Et une version française complète là (1) :

Des sorcières et des démons menant la danse,
Pas un de ces cotillons à la mode de France,
Mais gigues et strathpeys, et rondes,
Avec des cornemuses pour faire frapper les talons. 

A winnock-bunker in the east,
There sat auld Nick, in shape o' beast;
A towzie tyke, black, grim, and large,
To gie them music was his charge: 

He screw'd the pipes and gart them skirl,
Till roof and rafters a' did dirl,
Coffins stood round, like open presses,
That shaw'd the Dead in their last dresses;
 
And by some devilish cantraip sleight
Each in its cauld hand held a light.
By which heroic Tam was able
To note upon the haly table, 

A murderer's banes, in gibbet-airns;
Twa span-lang, wee, unchristened bairns;
A thief, new-cutted frae a rape--
Wi' his last gasp his gabudid gape; 

Five tomahawks, wi' blude red-rusted:
Five scimitars, wi' murder crusted;
A garter which a babe had strangled:
A knife, a father's throat had mangled. 

Whom his ain son of life bereft,
The gray-hairs yet stack to the heft;
Wi' mair of horrible and awfu',
Which even to name wad be unlawfu'.

As Tammie glowr'd, amaz'd, and curious,
The mirth and fun grew fast and furious;
The Piper loud and louder blew,
The dancers quick and quicker flew,

The reel'd, they set, they cross'd, they cleekit,
Till ilka carlin swat and reekit,
And coost her duddies to the wark,
And linkit at it in her sark!

Ils tournoyaient, sautaient, s'agitaient, se croisaient,
Tant et si bien que les diablesses, dont la sueur fumait,
Jetèrent leurs vêtements de tous côtés
Et se mirent à faire leur ronde en chemise!
(1)


(à suivre)



(1) La traduction française est celle de Jean Claude Crapoulet, Robert Burns, Poésies, édition bilingue, Aubier, 1994. Rien que pour Tam o' Shanter et The Jolly Beggars il faudrait se la procurer, sans compter la lumineuse introduction indispensable au lecteur francophone. Précipitez-vous chez votre libraire habituel avant qu'il ait fait faillite (3).


(2) Le gaélique écossais est la langue des Highlands et des Hébrides alors que le scots, proche de l'anglais, est celle des Lowlands. La même différence existe entre le breton et le gallo.

(3) Note de 2019 : c'est bien ce que je disais il y a neuf ans de cela : il est trop tard, le livre est épuisé et votre libraire a fait faillite.


Et pendant ce temps-là... 

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