27/09/2022

Ronde de nuit : Ozenfant, et encore Magritte


 Amédée Ozenfant - Gratte-ciel éclairé, 1950



 Magritte - Le noctambule (Le Réverbère), 1927/28
 
 
 
 
Ces deux images, via Belgian Paintings
 

25/09/2022

L'art de la rue : Alechinsky


Pierre Alechinsky - Ville d'Arles, 1985
Frottis de plaque d'égout à l'encre de Chine

24/09/2022

Conditions de survie


Robert Humblot - Les toucans, 1950
Huile sur toile
Coll. privée

 

René Magritte - Le survivant, 1950
Huile sur toile
Menil Collection, Houston, Texas 
 
 
 
 
Ces deux images via A Still Life Collection.

 

23/09/2022

L'art de la mémoire : coins dangereux et pommes de terre mal cuites


Christopher Chamberlain - The dangerous Corner, 1954  
Huile sur panneau
Tate

 

L'adresse exacte est inscrite au dos du tableau : 402 Fulham Road S.W. 6  - Fulham road à droite au fond,  et Moore Park road au premier plan. Aujourd'hui...



...à part les immeubles de Fulham road (mais il sont cachés par les arbres) on ne retrouve que le petit coin de mur en briques rouges, probablement refait à neuf, mais c'est un mur de briques rouges...

(et si on se retournait on verrait un grand mural à la gloire du Chelsea Footbal Club, le stade est juste derrière)

...et pourquoi ce petit mur fait-il penser au mourant Bergotte...

 

Marcel Proust, La prisonnière, 1923


 ...et à son petit pan de mur jaune de la Vue de Delft...


Johannes Vermeer - Vue de Delft, ca 1660-61, détail   


...(outre le fait qu'il est difficile de trouver un petit pan de mur jaune avec un auvent sur ce tableau, et si on croit le trouver on s'aperçoit que c'est plutôt un toit), oui, pourquoi ?

Vous me direz (et si vous ne me le dites pas, je le dirai pour vous) que Chamberlain et Vermeer peignaient dans le même esprit, si l'on s'en tient à ce que dit de son tableau l'artiste anglais : I have made many studies in this area where I live, in the belief that one must learn thoroughly something about a particular and loosely limited area within one's experience. I don't believe it is possible to make much of a statement about anything unless one knows one's subject very well indeed (1) ce qui correspond assez à ce que nous croyons (2) savoir de Vermeer - ou plutôt à ce que nous devinons à partir de ses tableaux.

Allons un peu plus loin.

Il n'y a pas de magie, pas d'illusion sans réalité. Et ce qui nous fascine chez Vermer c'est que nous y voyons une réalité, théâtralisée parfois certes, mais la réalité de Delft, on y rêve parfois une photo d'époque...

 

Johannes vermeer - Het Straatje / La petite rue, ca 1657-58 
Rijksmuseum Amsterdam


...mais on voit vibrer Delft bien mieux que s'il existait une photo d'époque, de même que c'est dans des romans, et non dans des livres d'histoire  qu'on sent vraiment gronder la révolution de 1848, claironner les comices agricoles normands ou festoyer les mercenaires dans les jardins d'Hamilcar. Il y faut un mur qui soit vraiment un mur, disons qu'il faut du travail et de l'observation - one must learn thoroughly something about a particular and loosely limited area - et que sans ce réel, sans ce travail, pas de magie. Mais voilà, il faut de la magie : c'est ainsi que j'aurais dû écrire se dit Bergotte, mes derniers livres sont trop secs, il aurait fallu passer plusieurs couches de couleur, rendre ma phrase en elle-même précieuse, comme ce petit pan de mur jaune.

C'est la magie et le réel, ensemble feuilletés, qui font qu'on retrouve ce mur de brique rouge au coin de Moore Park road, c'est le même et ce n'est pas le même - ce coin est-il toujours dangereux ? Il y a ce tremblement du temps et ce Londres perdu qui ne reviendra jamais et cette petite dame au coin de la rue qui n'en finit pas de passer, comme resteront éternellement à Delft, de l'autre côté du miroir, ces petits personnages en bleu sur ce sable rose...

 


...que Bergotte remarque pour la première fois. Et sur ce, peut-être parce qu'il a mangé des pommes de terre mal cuites, il meurt. 

Mais est-il mort, vraiment ? Sont-ils morts, les petits personnages bleus ? Et la petite dame au coin de Fulham street, est-elle vraiment morte aussi ? Un an après sa propre mort, dans un passage célèbre de La prisonnière, Proust envisageait d'autres possibilités :

Ce qu'on peut dire, c'est que tout se passe dans notre vie comme si nous y entrions avec le faix d'obligations contractées dans une vie antérieure ; il n'y a aucune raison dans nos conditions de vie sur cette terre pour que nous nous croyions obligés à faire le bien, à être délicats, même à être polis, ni pour l'artiste cultivé à ce qu'il se croie obligé de recommencer vingt fois un morceau dont l'admiration qu'il excitera importera peu à son corps mangé par les vers, comme le pan de mur jaune que peignit avec tant de science et de raffinement un artiste à jamais inconnu, à peine identifié sous le nom de Ver Meer. Toutes ces obligations qui n'ont pas leur sanction dans la vie présente semblent appartenir à un monde différent, fondé sur la bonté, le scrupule, le sacrifice, un monde entièrement différent de celui-ci, et dont nous sortons pour naître à cette terre, avant peut-être d'y retourner revivre sous l'empire de ces lois inconnues auxquelles nous avons obéi parce que nous en portions l'enseignement en nous, sans savoir qui les y avait tracées, — ces lois dont tout travail profond de l'intelligence nous rapproche et qui sont invisibles seulement — et encore ! — pour les sots. De sorte que l'idée que Bergotte n'était pas mort à jamais est sans invraisemblance.


 

 

(1) Lettre du 3 avril 1955, selon la Tate.

(2) Mis à part les faits qu'il est né, qu'il a épousé une riche catholique, qu'il a eu un certain nombre d'enfants, qu'il a peint et qu'il est mort, on ne sait strictement rien de Vermeer.

 

 

 

 

 

22/09/2022

L'art de la rue : quartier gare


Rémi Bonnaure - Titre inconnu
Peinture ornementale du plafond à caisson dans le hall de l'Hôtel de Ville d'Alès. 

 
Vue du quartier de la gare, probablement au début du siècle dernier. Derrière le mur à droite se trouvaient les deux grandes rotondes à locomotives d'Alès - à l'emplacement actuel de la gare routière.
 
J'ai toujours été fasciné par le décoratif, les scènes (même naïves, surtout naïves) peintes au mur des brasseries, des mairies - des hôpitaux parfois - jusqu'au Puvis de Chavannes du grand amphi, tiens, qui est quand même d'une grande naïveté... Ce sont des membranes osmotiques entre l'usuel et l'impossible, le présent et le passé, le quotidien et le sauvage.
 
J'avais un oncle qui peignait des fonds marins avec poissons et crustacés géants sur les parois entières des restaurants de bord de plage, on se serait cru dans un aquarium pour tout-petits. Ne faites pas attention, mais ailleurs vous regarde.


20/09/2022

Poésie illustrée : il saute et saute toujours plus haut

 


 

 

 


Osamu Tzezuka - Jumping, 1984 
 
 
 
 
 
Jean Arp & Camille Bryen - Notre petit continent, 1958, PAB éditions
 
 
 
Ces pages de Notre petit continent sont visibles dans l'exposition Jean Arp, un jour, des années, une vie, jusqu'au 9 octobre 2022 au Musée PAB (Pierre-André Benoît) d'Alès.
 

11/09/2022

Louons maintenant les modèles : Marcel Gillis

Marcel Gillis - Cours de dessin, 1928

Fusain et graphite sur papier 

 

On peut aussi écouter chanter Marcel Gillis (en dialecte Montois)
 

09/09/2022

L'art de l'action directe

Harry Rutherford - The Opening of the Chartists' Meeting House, Hyde
Astley Cheetham Art Gallery

 

Hyde, près de Manchester, est une des premières villes anglaises à avoir construit, en septembre 1838, un bâtiment à l'usage des réunions du mouvement chartiste, le Working Men's Institute

Sur le tableau, on voit à la tribune Joseph Rayner Stephens, pasteur méthodiste et principal leader chartiste de Tameside, s'adressant à la foule juste au moment où il va être arrêté par la police avant d'être condamné à dix-huit mois de prison pour prise de parole devant un meeting interdit.

Ce district de Tameside, autour de Hyde, avec ses dizaines d'usines de coton, était au cœur de la révolution industrielle manchestérienne et, en même temps, un des foyers du Chartisme - à la fois mouvement ouvrier et mouvement démocratique de masse, culminant pour la région dans la grève générale d'Août 1848.


 

Le monument Pull the Plug, Ring the Change 
aux Chartistes de Tameside, devant l'Hôtel de ville de Hyde


Lors de cette grève, une manifestation de Chartistes, armés de fusils, de pistolets, de piques et d'épées traversa Hyde en pleine nuit. Les manifestants entrèrent dans les usines et enlevèrent les bouchons de vanne ("pull the plug") des chaudières qui alimentaient les machines, provoquant ainsi l'arrêt complet des usines pour une durée d'un mois. D'où le nom de Plug riots pour désigner ces journées, et l'expression "pulling the plug", qui est d'ailleurs toujours usitée pour des actions de ce type. Sur le monument, le personnage de gauche tient à la main un de ces plugs arrachés.


08/09/2022

A une passante : Gorsline

 Douglas Warner Gorsline - Brooklyn Local, 1945 

Eau-forte


 

D'autres stations de métro par là.

Bien que natif de Rochester, NY, Gorsline est mort en Bourgogne. On peut donc visiter le Musée Gorsline à Bussy-le-grand et se renseigner ici aussi.

 

07/09/2022

Entre chien et loup : Bohrod/Madgwick


Aaron Bohrod - House in South Chicago


Lee Madgwick - Titre inconnu
Acrylique sur toile

 

 

 

06/09/2022

L'art de la conversation : alternative à trois

Laurent Durieux - Affiche alternative pour The Conversation / Conversation secrète

 

Et de Laurent Durieux, déjà.
 

05/09/2022

L'art de la cuisine : reversals and negation

Charles Ritchie - Kitchen with shadows and Reflections, 2017
 

 

Thoughts and dreams are often transcribed on the page in a private note hand, a channeling of my subconscious that heightens my engagement with the process. This writing is essential to my journals, also on view. (...)
Reversals and negation are important. I often rediscover the white of the page or obliterate and reconfigure an image by dry erasing, wetting and scrubbing with fine bristle brushes, and occasionally scratching, scraping and sanding.  My essential tool is sustained observation. I have worked in this room with these subjects for thirty-three years. For me, the pages combine looking, memory, association, accident, improvisation, and imagination into extended meditations on self and world. 

Charles Ritchie - 16 pages pour Bravinlee Programs, 7 septembre - 16 octobre 2017


Et de Charles Ritchie, déjà (avec un virus et du Piémont dedans).

04/09/2022

L'art du balai : l'art de la lecture

Théodule Ribot - La servante studieuse, ca 1871

Collection Burrell, Glasgow

 

 


Détails 1 & 2

Via Forte tête sur talons hauts

 

 

À noter que le balai est un motif fréquent

Et de Théodule Ribot, déjà.


 

02/09/2022

Constitutionnelle, mais occulte


Leonardo Sciascia lisant le Giornale di Sicilia

 

 

On pourrait donc admettre qu'il existe une charte constitutionnelle occulte dont le premier article stipule que "La sécurité du pouvoir se fonde sur l'insécurité des citoyens".

Leonardo Sciascia, Le chevalier et la mort, 1988

 

 

Leonardo Sciascia - Le chevalier et la mort, 1988 (1), trad. française de Michel Orcel et Mario Fusco

 

 

(1) Quand le locuteur de ce texte rappelle que "dans notre enfance nous avons éprouvé... un pouvoir qu'on peut aujourd'hui définir comme intégralement criminel mais un pouvoir qu'on peut aussi, paradoxalement, dire en bonne santé, toujours au sens du crime" il fait évidemment référence au pouvoir qui a régi l'Italie de 1928 à 1943. Quant au pouvoir schizophrénique d'aujourd'hui - Sciascia désignait cet alliage Démocratie chrétienne/Mafia, respectabilité de façade/sauvagerie de l'exploitation, typique de l'Italie de l'époque et qu'il connaissait bien, chez lui en Sicile - cela ne fait-il pas penser, jusque dans la relation intime d'un pouvoir cauteleux à une violence immergée, à notre pouvoir d'extrême-centre ?


 

 

Et pendant ce temps-là...

Critique de la raison Jetskiste (avec une vraie citation d'Immanuel Kant dedans)

Critique de la raison pessimiste (avec des coquelicots dedans)