14/09/2011

L'art du balai : à la personne




Tous les matins sur le coup de huit heures
Largo do Chiado à Lisbonne
elle  balaie, elle fait place nette
pour les touristes.
Juste après ils viendront s'asseoir
où le guide leur dit que venait le poète
café A Brasileira, sur la chaise de bronze
pour lui tenir la main 
et la photographie.




Não me preguem no braço !
Ne me prenez pas le bras !
Não gosto que me preguem no braço. Quero ser sòsinho.
Je n'aime pas qu'on me prenne le bras. Je veux être seul.
Já disse que sou só sòsinho !
Je l'ai déjà dit, je suis seul !
Ah, que maçada quererem que eu seja de companhia !
Ah, la barbe, que l'on me veuille de bonne compagnie !

Fernando Pessoa, Lisbon revisited, 1923.
Poésies et proses de Álvaro de Campos publiées du vivant de Fernando Pessoa, trad. Dominique Touati, La Différence éd. 1989.

Et ce soir il y aura fête
on boira de la bière
toute la nuit 
dans les petites rues qui vont à Bairro Alto.
Le lendemain
elle balaiera.




Comme on sait, Pessoa veut dire en portugais Personne. En un sens, la balayeuse de Pessoa effectue un service à la personne - sur ce sujet, une lecture intéressante :




(et une critique ici).




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