08/01/2011

Le temps travaille pour moi


Théophile Alexandre Steinlen - Chat dormant
Via Les grandspères ont toujours tort




Ode an das Nichtstun
Ode à l'oisiveté


Eines Vorweg:
Manche nennen es Nichtstun.
Dabei lasse ich nur
die Organe machen.

Hat man je Baüme
zum Bus rennen sehen?
Und Katzen um acht,
mit Schlips in der U-Bahn?


 Michael Wolf - Tokyo compression #5, 2010


Une chose soit dite par avance :
certains appellent cela oisiveté
Moi, je laisse seulement
faire les organes.
A-t-on jamais vu les arbres
courir à l'arrêt du bus ?
Et des chats à huit heures,
en cravates dans le métro ?

Allüberall müht das menschliche Fleisch
sich am Einkommen ab,
ohne Heimkehr.




Michael Wolf - Tokyo compression #17, 2010

En tous lieux, la chair humaine
peine pour gagner son revenu,
sans retourner chez elle.

Da schaue ich lieber den Blumen zu,
ihrem stetigen Zuwachs,
addiere des Windes
geheime Bilanzen. Und komme,
Krallen und Wolle wachsen derweil,
unablässig auf meine Kosten.


 Michael Wolf - Tokyo compression #33, 2010


Alors je préfère regarder les fleurs,
leur croissance permanente,
j'additionne les bilans
secrets du vent. Et j'y trouve,
- les griffes et la laine poussent pendant ce temps -
continuellement mon compte.

Wer immer jetzt fragt, was ich mache,
die Hände im Schoß,
eine Blüte der Kopf,

ihm sage ich: Siehst du es nicht?
Ich arbeite für die Zeit.
Die Zeit arbeitet für mich.


 Michael Wolf - Tokyo compression #52, 2010


Si quelqu'un demande ce que je fais,
les bras croisés,
la tête une fleur,

je lui dis : Ne le vois-tu pas ?
Je travaille pour le temps.
Le temps travaille pour moi.

Steffen Jacobs
trad. Barbara Paul dans
Sans quiétude aucune, anthologie de la poésie allemande contemporaine
éd. Le temps des cerises, 2001


Steffen Jacobs, né à Düsseldorf en 1968, vit à Berlin. Son premier recueil, Der Alltag des Abenteurers / Vie quotidienne de l'aventurier, est paru en 1996.

Michael Wolf, né à Munich en 1954, a été photojournaliste pour Stern en Asie avant de se lancer dans le projet Real Toy Story à la suite d'un reportage sur les manufactures chinoises. Dans sa production la plus récente, Tokyo compressions (2010) il photographie par les vitres du métro des commuters Tokyoïtes entassés pour leurs trajets quotidiens - voir son site.

Quant à Théophile Alexandre Steinlen, c'est le peintre qui disait "à quoi bon prêcher ? Il faut agir, le monde ne va pas ainsi qu'il devrait aller..." (1)



(1) Adolphe Brisson - Promenades et visites, M. Steinlen, peintre et ami du peuple, Le Temps, 23 novembre 1898.

1 commentaire:

manu a dit…

Tant de travail !
Heureusement nous sommes les champions de la productivité !