24/02/2020

Voyageuse en Ré majeur

 
Félix Mendelssohn - Romance sans paroles en Ré majeur, dédiée à Mlle Lise Cristiani op.109, pour violoncelle et piano, 1845
Jacqueline du Pré, violoncelle
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C'est vers le milieu du XIXème siècle que l'invention de la...





...pique de violoncelle...




...permit aux femmes de briller sur cet instrument sans être gênées par les robes d'époque. La première virtuose à bénéficier de cette amélioration fut Lise Cristiani.

C'est à Leipzig, à l'occasion d'un concert qu'elle y donna en 1845, que Mendelssohn fit sa connaissance. Il lui dédia cette Romance sans paroles, qui ne fut connue et publiée qu'après sa mort.

Lise Cristiani fut très probablement la première violoncelliste à pénétrer au Kamtchatka, au cours d'un long voyage...








...qui la mena donner ses concerts de Saint-Pétersbourg à Irkoutsk, puis à la Léna, jusqu'à Iakoutsk, Okhotsk et Pétropavlovsk. 



 Le Tour du Monde, VII, 1863, p. 397



Revenue épuisée à Moscou elle se découvre atteinte de la tuberculose, ce qui ne l'empêche pas de repartir pour l'Ukraine, puis le Caucase, toujours accompagnée de son violoncelle Stravidarius et du vieux pianiste qui la chaperonne. Sur le chemin du retour elle n'a pas encore vingt-six ans quand elle meurt du choléra à Novotcherkassk, chez les cosaques du Don.

De sa correspondance, on a tiré un récit de ses voyages à la première personne, publié en 1863 dans la revue Le Tour du Monde. On peut le lire ici sur Gallica ou là chez François Collin.

 

" Partie à la fin de décembre 1848 et revenue à Kasan au commencement de janvier 1850, mon voyage a duré un an et vingt-cinq jours environ. J'ai parcouru plus de dix-huit mille verstes de route, un peu plus de cinq mille lieues de France; j'ai visité quinze villes de la Sibérie, dont les principales sont Ekaterinenbourg, Tobolsk, Omsk, Tomsk, Irkoutsk, Kiachta, sur la frontière chinoise, Yakoutsk, Okhotsk, Petropaulowski et Ayane, aux bouches de l'Amour, villes toutes nouvellement fondées. J'ai traversé plus de quatre cents cours d'eau petits, moyens et grands , dont les plus considérables sont l'Oural, l'Irtish, le Ienisseï, la Léna, l'Aldan, l'Amour, à son embouchure. J'ai fait tout ce chemin en brishka, en traîneau, en charrette, en litière, tantôt traînée par des chevaux, tantôt par des rennes, tantôt par des chiens; quelquefois à pied, et plus souvent à cheval, surtout dans le trajet d'Iakoutsk à Okhotsk. J'ai aussi navigué pendant plusieurs centaines de lieues sur des fleuves qui avaient six ou sept cents lieues de cours, et, pendant plus de cinquante jours, sur l'océan Pacifique. J'ai reçu l'hospitalité parmi les Kalmouks, les Kirghis, les Cosaques, les Ostiaks, les Chinois, les Toungouses, les Yakoutes, les Bouriates, les Kamtschadales, les sauvages du Shagalien, etc., etc. Je me suis fait entendre en des lieux où jamais artiste n'était encore parvenu. J'ai donné en tout environ quarante concerts publics, sans compter les soirées particulières et les occasions que j'ai pu trouver de faire de la musique pour mon propre plaisir. " " Tel est le bilan de ma téméraire entreprise. Pierre qui roule n'amasse pas de mousse, dit un vieux proverbe; j'ai vérifié par moi-même l'exactitude de ce dicton. J'ai la mort dans l'âme .... je suis heureuse comme un galet en pleine tempête .... mes douleurs croissent; mes forces diminuent; que devenir donc? J'ai tout essayé, même de ce damné pays où chaque buisson cache une embuscade; mais je n'ai pas de chance, et au lieu de la balle que j'y cherchais, je n'ai attrapé que des bonbons enlevés à Schamyl dans une escarmouche! N'est-ce pas du guignon?... "


 


 Ill. pour Le Tour du Monde 







Ceux qui s'intéressent aux grandes voyageuses comme Lise Cristiani feront bien des découvertes chez Françoise Lapeyre.

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