05/07/2021

À quelques degrés près


L.S. Lowry - Firewatcher, 1943

Museums Sheffield

 

 


Incendie au-dessus de la Fraser River Valley, près de Lytton, Colombie britannique, 2 juillet 2021
 
 
Quelques jours à peine après la publication d’une ébauche du rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), le Canada mesure encore une fois les conséquences des bouleversements environnementaux. Une partie de la Colombie-Britannique est sous un dôme de chaleur qui lui donne les allures d’une « vallée de la mort », comme dans le désert du Mojave, en Californie.
 
Jour après jour, la Colombie-Britannique bat tous les records de chaleur. La température la plus élevée, 49,6 °C, a été enregistrée à Lytton, un village à trois heures de route au nord-ouest de Vancouver. Il s’agit d’un record absolu depuis que le Canada tient de telles statistiques. Cette vague de chaleur a accentué les risques d’incendie, et voilà que Lytton a été dévoré par les flammes, ses 1000 résidents fuyant pour leur vie.
 
Cette chaleur infernale qui englobe également l’Alberta et six États du nord-ouest des États-Unis est lourde de conséquences funestes. Les urgences débordent, le personnel de la santé et les premiers répondants ne savent plus où donner de la tête et près de 500 personnes sont déjà mortes subitement, tandis que d’autres manquent à l’appel dans le brasier de Lytton.
 
Loin de constituer des faits divers isolés, ces morts procurent une couche de vérité aux rapports alarmistes que le GIEC publie sur une base récurrente. La canicule en Colombie-Britannique tient de l’exception, diront les climatosceptiques. Gardons-nous de tirer des conclusions générales à partir d’un cas anecdotique, ajouteront-ils.
 
Au contraire, il s’agit d’une illustration patente des conséquences du réchauffement de la planète contre lesquelles les scientifiques nous mettent en garde, rehaussant l’intensité de leur cri d’alarme année après année. Dans le prélude à son rapport 2022, le GIEC prévient que la limite de 2 °C de réchauffement fixée dans l’Accord de Paris sera insuffisante. Un dépassement de 1,5 °C sera déjà dévastateur.
 
Envisagée sous cette lorgnette, la vague de chaleur qui afflige la Colombie-Britannique et qui se dirige lentement vers l’est nous offre une plongée vers un futur très rapproché. Les morts de la Colombie-Britannique, le sentiment de désespoir des ménages qui s’accrochent à leur air conditionné comme si leur vie en dépendait, les difficultés de la sécurité civile pour répondre à une crise dont l’ampleur n’a d’égale que la vélocité, l’impossibilité de dompter les forces de la nature déréglée : voici l’avenir que nous léguerons à nos enfants. (...)
 
Nous sommes tous à quelques degrés près d’entrer dans la vallée de la mort.
 
Brian Myles, Le Devoir, éditorial du 3 juillet 2021.


 

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