"Raffiniert ist der Herrgott, aber boshaft ist er nicht" "Dieu est subtil, mais pas malicieux (ou malveillant)", aurait dit Albert Einstein à Princeton en 1921. En fait, il voulait parler des expériences de Dayton Miller (à l'interféomètre de Michelson) sur le Vent d'éther. Et, exclusivement pour les obsédés de précision (ce que les chats [1] ne sont pas), plus de détails ici.
Les cow-boys fringants - L'Amérique pleure, de l'album Les Antipodes, 2019
Encore un jour à se lever en même temps que le soleil La face encore un peu poquée, mon 4h de sommeil yeah J'tire une couple de puffs de clope Job done pour les vitamines Pis un bon café à l'eau de moppe Histoire de s'donner meilleure mine Yeah J'prends le Florida Turnpike pis demain soir j'ta Montmagny Non trucker ç'pas vraiment l'Klondike mais tu vois du pays, yeah Surtout que ça te fait réaliser que derrière les beaux paysages Y a tellement d'inégalités et de souffrance sur les visages La question que j'me pose tout le temps Mais comment font tous ces gens Pour croire encore en la vie dans cette hypocrisie C'est si triste que des fois quand je rentre à la maison Pis que j'park mon vieux camion J'vois toute l'Amérique qui pleure dans mon rétroviseur Moi je traîne dans ma remorque tous les excès de mon époque La surabondance surgelée, shootée suremballée, yeah Pendant que les vœux pieux passent dans le beurre Que notre insouciance est repue C'est dans le fond des containers que pourront pourrir les surplus La question que j'me pose tout le temps Mais que feront nos enfants Quand il ne restera rien que des ruines et leur faim C'est si triste que des fois quand je rentre à la maison Pis que j'park mon vieux camion Je vois toute l'Amérique qui pleure dans mon rétroviseur Sur l'interstate-95 partent en fumée tous mes rêves Un char en feu dans une bretelle, un accident mortel, yeah Et au milieu de ce bouchon Pas de respect pour la mort Chacun son tour joue du klaxon, tellement pressé d'aller nulle part La question que j'me pose tout le temps Mais où s'en vont tous ces gens Y a tellement de chars partout, le monde est rendu fou C'est si triste que des fois quand je rentre à la maison Pis que j'park mon vieux camion Je vois toute l'Amérique qui pleure dans mon rétroviseur Un autre truck-stop d'autoroute, pogné pour manger d'la schnoutte C'est vrai que dans la soupe du jour y a pu tellement d'amour yeah On a tué la chaleur humaine avec le service à la chaîne À la télé un autre malade vient d'déclencher une fusillade La question que j'me pose tout le temps Mais comment font ces pauvres gens Pour traverser tout le cours d'une vie sans amour C'est si triste que des fois quand je rentre à la maison Pis que j'park mon vieux camion Je vois toute l'Amérique qui pleure dans mon rétroviseur Rien n'empêche que moi aussi, quand j'roule tout seul dans la nuit J'me demande des fois ce que je fous ici, pris dans l'arrière-pays, yeah J'pense à tout c'que j'ai manqué avec Mimi pis les deux filles Et j'ai ce sentiment fucké d'être étranger dans ma famille La question que j'me pose tout le temps Pourquoi travailler autant M'éloigner de ceux que j'aime, tout ça pour jouer la game C'est si triste que des fois quand j'suis loin de la maison Assis dans mon vieux camion J'ai toute l'Amérique qui pleure quelque part au fond du cœur
Dans la catégorie Comparsa, c'est le groupe de Tino Tovar qui a donc gagné la grande finale du COAC, le concours officiel du Carnaval de Cadix 2020, au Gran Teatro Falla ce dernier samedi. Ci-dessous, les paroles de la première partie, la Presentación. On trouvera le texte complet de la suite par ici.
Il s'agissait de la partie officielle, depuis samedi toutes les troupes, y compris les ilegales, jouent dans les rues. Hier, c'était le Lundi de la gueule de bois.
Oh capitán Tu que quiebras mis cadenas Tu que me haces tiritar Tu mi patria sin bandera Tus mis alas pa volar Tu mi desgarro de anhelos Tu la voz de mis desvelos Tu presente tempestad Devuélveme La libertad Devuélveme La libertad Tu que desenredas nuestra sombra Tu que resucitas mi compás Tu luchando al frente de los míos Tu mi más febril debilidad Tu mi planetario de canciones Tu mi gaditano despertar Tu mi trono en piedra ostionería Tu el que manda en mi trinchera Tu mi vicio y mi pecado Mas mortal Mi realidad más pura y más bonita de diez a doce encerrao en un portal Allí donde mis sueños cobran vida Allí donde me haces especial Soñando con que abras cortinas Y otra vez contigo Y otra vez mi hogar Soñando con venirte aquí a cantar Oh capitán, mi capitán Oh capitán Eres música y letra Un estribillo Un trabalenguas Y eres piñatav
Disfraz y canción Y eres guitarra Y mi clave de sol Y eres tanguillo Bombo y platillo Faro de presentación Y eres papelillos Y eres serpentinas Y eres plumero y pregón Y eres un tachin tatachin Tretoreto tachin A nudillo y pulgón Y eres gaditana y los Duros Antiguos Y Antonio Cantando Charlot Y eres El Carota y Fletilla El Sopa y el Peña Y Aguillo y Pepón Y eres la magia del caos La más pura anarquía de la creación Oh capitán Oh capitán mi carnaval Oh carnaval mi capitán Oh capitán mi carnaval Oh capitán Tu carnaval
Félix Mendelssohn - Romance sans paroles en Ré majeur, dédiée à Mlle Lise Cristiani op.109, pour violoncelle et piano, 1845 Jacqueline du Pré, violoncelle
C'est vers le milieu du XIXème siècle que l'invention de la...
...pique de violoncelle...
...permit aux femmes de briller sur cet instrument sans être gênées par les robes d'époque. La première virtuose à bénéficier de cette amélioration fut Lise Cristiani.
C'est à Leipzig, à l'occasion d'un concert qu'elle y donna en 1845, que Mendelssohn fit sa connaissance. Il lui dédia cette Romance sans paroles, qui ne fut connue et publiée qu'après sa mort.
Lise Cristiani fut très probablement la première violoncelliste à pénétrer au Kamtchatka, au cours d'un long voyage...
...qui la mena donner ses concerts de Saint-Pétersbourg à Irkoutsk, puis à la Léna, jusqu'à Iakoutsk, Okhotsk et Pétropavlovsk.
Le Tour du Monde, VII, 1863, p. 397
Revenue épuisée à Moscou elle se découvre atteinte de la tuberculose, ce qui ne l'empêche pas de repartir pour l'Ukraine, puis le Caucase, toujours accompagnée de son violoncelle Stravidarius et du vieux pianiste qui la chaperonne. Sur le chemin du retour elle n'a pas encore vingt-six ans quand elle meurt du choléra à Novotcherkassk, chez les cosaques du Don.
De sa correspondance, on a tiré un récit de ses voyages à la première personne, publié en 1863 dans la revue Le Tour du Monde. On peut le lire ici sur Gallica ou là chez François Collin.
"
Partie à la fin de décembre 1848 et revenue à Kasan au commencement de
janvier 1850, mon voyage a duré un an et vingt-cinq jours environ. J'ai
parcouru plus de dix-huit mille verstes de route, un peu plus de cinq
mille lieues de France; j'ai visité quinze villes de la Sibérie, dont
les principales sont Ekaterinenbourg, Tobolsk, Omsk, Tomsk, Irkoutsk,
Kiachta, sur la frontière chinoise, Yakoutsk, Okhotsk, Petropaulowski et
Ayane, aux bouches de l'Amour, villes toutes nouvellement fondées. J'ai
traversé plus de quatre cents cours d'eau petits, moyens et grands ,
dont les plus considérables sont l'Oural, l'Irtish, le Ienisseï, la
Léna, l'Aldan, l'Amour, à son embouchure. J'ai fait tout ce chemin en
brishka, en traîneau, en charrette, en litière, tantôt traînée par des
chevaux, tantôt par des rennes, tantôt par des chiens; quelquefois à
pied, et plus souvent à cheval, surtout dans le trajet d'Iakoutsk à
Okhotsk. J'ai aussi navigué pendant plusieurs centaines de lieues sur
des fleuves qui avaient six ou sept cents lieues de cours, et, pendant
plus de cinquante jours, sur l'océan Pacifique. J'ai reçu l'hospitalité
parmi les Kalmouks, les Kirghis, les Cosaques, les Ostiaks, les Chinois,
les Toungouses, les Yakoutes, les Bouriates, les Kamtschadales, les
sauvages du Shagalien, etc., etc. Je me suis fait entendre en des lieux
où jamais artiste n'était encore parvenu. J'ai donné en tout environ
quarante concerts publics, sans compter les soirées particulières et les
occasions que j'ai pu trouver de faire de la musique pour mon propre
plaisir. "
" Tel est le bilan de ma téméraire entreprise. Pierre qui roule n'amasse
pas de mousse, dit un vieux proverbe; j'ai vérifié par moi-même
l'exactitude de ce dicton. J'ai la mort dans l'âme .... je suis heureuse
comme un galet en pleine tempête .... mes douleurs croissent; mes
forces diminuent; que devenir donc? J'ai tout essayé, même de ce damné
pays où chaque buisson cache une embuscade; mais je n'ai pas de chance,
et au lieu de la balle que j'y cherchais, je n'ai attrapé que des
bonbons enlevés à Schamyl dans une escarmouche! N'est-ce pas du
guignon?... "
Elisabeth Vigée Lebrun - Portrait d'Emma, Lady Hamilton, en bacchante, ca 1790
Huile sur toile
Walker Art Gallery, Liverpool
Alexander Korda - Lady Hamilton, 1941
Mis en ligne par Jonny Yordanova
(1) Faut-il le rappeler, Amy Lyons, dite Emma Hart puis lady Emma Hamilton, qui fut à Londres prostituée, danseuse nue puis un des grands modèles d'art de son temps, est alors l'Ambassadrice, femme de William Hamilton, ambassadeur d'Angleterre à la cour de Naples, et favorite de la reine Marie-Caroline. Elle sera, jusqu'à la mort de l'amiral, la compagne d'Horatio Nelson et la mère de sa fille.
Raymond Daussy fait partie des artistes dont la trajectoire hésite entre le surréalisme et le réalisme socialiste, ce qui peut s'expliquer par une proximité avec le PCF au moment et au sortir de la seconde guerre - mais pas seulement ; si les rapports du surréalisme avec le réel ont été parfois compliqués sur le plan politique (1), ces intermittences sont aussi celles, plus largement, des rapports entre le réel et sa représentation.
George Grosz - Ill. pour Rudolf Omansen, Das unheimliche Huhn, 1958 Coll. privée
George Grosz fuit l'Allemagne en janvier 1933, pour les Etats-Unis. Sous le régime nazi, des centaines de ses œuvres sont confisquées, détruites ou perdues. Grosz et sa femme ne reviennent en Allemagne qu'en 1959 ; ils ont déjà entamé une procédure pour être dédommagés conformément aux lois dite de restitution et de compensation (en abrégé, Bundesentschädigungsgezetz & Bundesrückerstattungsgesetz).
Les procédures sont lentes et labyrinthiques ; Grosz est malade, alcoolique et dépressif ; pour appuyer sa demande il a recours au docteur Rudolf Omansen, du Bureau berlinois des compensations.
Omansen devient son ami. Grosz illustrera sa nouvelle, Das unheimliche Huhn / Le poulet maléfique, l'histoire d'un poulet imaginaire qui devient de plus en plus réel et persécute un pauvre professeur d'archéologie - métaphore des blessures psychiques que diagnostiquait Omansen - entre autres, chez ses patients en attente de compensation.
Grosz mourra deux mois après son retour en Allemagne, d'une chute dans les escaliers après avoir trop bu une nuit durant. La nouvelle d'Omansen attendra soixante ans avant d'être publiée.
Il existe un excellent (et maléfique) roman sur le retour des exilés allemands, aux prises avec les procédures de restitution/compensation en Allemagne fédérale après la seconde guerre mondiale : d'Ursula Krechel, Landgericht / Terminus Allemagne dans la traduction française, Carnets Nord éd. 2014.
Charles Meryon - Portrait de M. Edmond de Courtives élève pharmacien ami de Charles Meryon et cousin d'Edouard Foleÿ fait et donné par Meryon à E. Foleÿ fait vers 1853 Eau-forte Source : Gallica/BnF
Une des premières eaux-fortes de Meryon (1), elle porte le n°9 dans le catalogue de Schneiderman, qui donne 1849?pour date.
Foleÿ faisait partie, avec Meryon, des officiers de la corvette Le Rhin dans son voyage vers la Nouvelle-Zélande. Tous deux regagnent Paris en 1846, Foleÿ partageant l'appartement de Meryon, rue Neuve-Saint-Etienne-du-Mont, pendant deux ans jusqu'en 1853. C'est probablement pendant cette période que ce dessin est réalisé. De Courtives est l'auteur d'une thèse sur Le haschish en 1848.
"Il m'a fait cadeau d'un exemplaire, que je garderai soigneusement comme un échantillon de son esprit, qui me remet souvent Hoffmann en mémoire"
Charles Meryon, lettre à Edouard Foleÿ, 29 avril 1848
De Courtives a pratiqué à Bicêtre aux côtés de Jacques-Joseph Moreau, dit Moreau de Tours, pionnier de la recherche scientifique des effets des drogues sur le système nerveux central, et auteur de l'étude inaugurale sur le sujet, le traité Du haschisch et de l'aliénation mentale (1845).
Il faut rappeler que Moreau de Tours est aussi l'initiateur de ces soirées sur invitation que Théophile Gautier a nommées Le club des haschischins, au cours dequelles les effets de la substance étaient expérimentés par des participants qui pouvaient se nommer Baudelaire, Nerval, Daumier, Balzac.
Le club se réunissait hôtel de Pimodan (aujourd'hui de Lauzun) dans l'Ile Saint-Louis au 17 quai d'Anjou...
Eugène Atget - Hôtel de Lauzun, 17 quai d'Anjou, ca 1900
...à l'étage noble, dans l'appartement que Boissard de Boisdenier - peintre romantique un peu oublié aujourd'hui (2) - partageait avec Joséphine Bloch dite Marix, un des plus beaux modèles de l'époque, qu'on peut reconnaître dans
Charles de Steuben - La Esmeralda, 1839, détail.
Boissard, qui est dans ces années, après Emile Deroy, le second vrai contact de Baudelaire avec le monde de l'art, s'installe vers avril 1845 à l'hôtel de Pimodan, juste au-dessous de l'appartement que Baudelaire loue depuis octobre 1843 :
"sous les combles, un appartement de trois cent cinquante francs par an composé (...) de deux pièces et d'un cabinet. Je revois en ce moment la chambre principale, chambre à coucher et cabinet de travail, uniquement tendue sur les murs et au plafond d'un papier rouge et noir, et éclairée par une seule fenêtre dont les carreaux, jusqu'aux pénultièmes inclusivement, étaient dépolis «afin de ne voir que le ciel», disait-il" (3).
Appartement de Baudelaire à l'hôtel de Pimodan
Baudelaire quitte l'hôtel de Pimodan à la fin de septembre 45, mais continue à visiter Boissard et Marix - c'est probablement ainsi qu'il participe à quelques-unes des séances mensuelles du club des haschischins. La première qui soit connue des biographes (4) date du 3 novembre 1845, la seconde du 22 décembre suivant - en présence entre autres de Balzac, pour une scène qu'on retrouve dans Les paradis artificiels.
C'est un ou deux ans plus tard, vers 1846 ou 47, que de Courtives, au contact de Moreau lors de son séjour à Bicêtre, goûte au haschisch - sous forme de résine pure, et non pas mélangée comme le faisait Moreau - avant de publier sa thèse et d'être dessiné par Meryon. Cette gravure prend donc place dans le réseau d'affinités et de coïncidences qui relient Meryon et Baudelaire, le poète et le peintre graveur, chacun par excellence, du XIXème siècle parisien.
(1) "Cette pièce, une des premières donc que j'ai gravées, est assez mauvaise, je n'ai besoin de le dire. Ce jeune homme était de St Florentin, où il venait de s'établir, quand je terminai cette petite pièce, faite d'ami à ami. Je lui en envoyai quelques épreuves, dont une où il était représenté à mi-corps, comme dans mon dessin original, ayant à côté de lui un violon dont il jouait assez bien, et quelques instruments de chimie. C'est dans celle-là surtout qu'on peut constater l'infériorité et la gaucherie de mon dessin ; aussi, après avoir corrigé de mon mieux le modelé du visage, m'arrangeai-je, en l'imprimant, de manière à le réduire à cette dernière partie seulement, dans un cadre circulaire." Charles Meryon, Mes observations, 1863.
(4) Par un billet de Boissard à Théophile Gautier, conservé dans les papiers de ce dernier, cf. Claude Pichois & Jean Ziegler, Charles Baudelaire, Fayard éd. 1996, p. 219.